dimanche 30 janvier 2011

CERRO RICO: Un symbole concret cinq fois centenaire et toujours actuel....des Veines ouvertes de la Planète!

Éditorial
de Fernand Dumont

Après presque 500 ans d'exploitation au pic et à la pelle, la fameuse montagne andine risque un peu plus à chaque heure de
s'effondrer sur elle-même.

Photo(Source: erbol.com):Cratère au sommet du Cerro Rico, Potosi (Bolivie)
Depuis 10 ans que l'alerte est lancée, il est impossible d'empêcher les travailleurs miniers, y compris femmes et enfants, d'entrer chaque jour par une des 120 ouvertures encore actives dans les innombrables galeries. Au cours de l'histoire 420 des 600 percées dans le Cerro Rico ont donné accès à des filons lucratifs. Des milliers de tonnes d'argent en ont été extraites par les Boliviens de Potosi à 4000 mètres d'altitude. Pourtant les signes de richesses y sont rares.
Les ressources de la montagne ont plutôt servi depuis 500 ans à la construction du système monétaire et financier occidental en croissance exponentielle depuis, malgré les crises financières qui ont jalonné l'histoire des empires capitalistes. On a toujours trouvé un nouveau filon de richesse quelque-part dans le monde pour "renflouer le système".
Les humains sont encore ainsi: la montagne criblée de trous et jonchée de gravats toxiques lixiviés par les pluies est un véritable piège mortel, mais ils ne voient que cette opportunité pour survivre, espérer vivre un peu mieux, voire s'enrichir...un véritable casino de forçats où on joue à la roulette russe! Face aux défis du climat, de la justice éco-sociale et de la préservation des biens communs, les décideurs du monde n'agissent pas autrement en ce moment-même au Sommet économique de Davos. Le contrôle et la concentration de la richesse est loin d'être garante de la sagesse!
Le mont Cerro Rico fait partie du Patrimoine mondial de l'Unesco, un bien commun culturel de l'humanité. Sa préservation exigerait d'abord qu'on explore, qu'on invente et mette en oeuvre avec, par et pour les gens de Potosi, des alternatives à son exploitation artisanale. Ce serait l'une des premières dettes éco-sociales que le système financier mondial, dont nous profitons ici au Nord, se devrait de rembourser. Même si cela s'avérait un jour, rien n'assurerait que la montagne tienne le coup... qu'au moins des milliers de vies soient sauvées. Actuellement, c'est le modèle de développement de Potosi qui règne sur le monde; l'histoire du Cerro Rico nous montre que c'est un modèle insoutenable, absurde et suicidaire.

En Suisse, a l'issue du Sommet de Davos, la poignée de nantis de ce monde aura continué d'imaginer l'ouverture de nouvelles galeries, avec le même acharnement aveugles que les mineurs. À l' Open Forum,organisé en parallèle à Davos par la Fédération des Eglises Protestantes de Suisse (FEPS), puis bientôt à À Dakar, au Forum Social mondial 2011 il s'agit de tout autres choses: d'un autre monde possible dont la construction est commencée. Entrepreneurs alternatifs, Bienvenue!

L'écrivain urugayen Eduardo Galeano commence son livre Las veinas abiertas de America latina, en retraçant l'histoire coloniale de Potosi où 15,000 mineurs risquent leur vie à tous les jours dans le Cerro Rico en désagrégation. Nous pouvons aujourd'hui, à l'heure de la mondialisation, paraphraser Galeano en parlant des Veines ouvertes de la Planète...

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