lundi 5 septembre 2011

Le Canada ouvre-t-il les vannes du commerce militarisé en Colombie en vertu du libre-échange?

La veille de l'entrée en vigueur de l'Accord général de libre échange avec la Colombie, Stephen Harper vilipendait les critiques de cet accord en les accusant de protectionnisme sous le couvert de la défense des des droits humain. Lire plus (en anglais) dans cet article du quotidien torontois: The Star: http://www.thestar.com/news/canada/article/1037548--harper-lashes-out-at-critics-of-canada-colombia-free-trade-deal

" Nous ne pouvons pas bloquer le progrès d'un pays comme celui-ci pour des raisons protectionnistes, et vous tentez d'utiliser les droits humains comme d'une façade pour faire cela" a déclaré le PM Harper au palais présidentiel de Colombie après avoir été questionné par un journaliste au sujet des critiques qui invoquent les droits humains pour s'inquiéter des conséquences des négociations de libre-échange entre le Canada et la Colombie.

À l'instar de nombreuses ONG canadiennes parmi lesquelles Développement et Paix, Le NPD s'était opposé en 2008 au projet d'accord de libre-échange avec la Colombie et avait essayé de bloquer l'entente. Mais cette entente a passé et devait entrer en vigueur le 15 août 2011.

Des oppositions analogues ont été menées par des groupes syndicaux et des législateurs au États-Unis. L'administration Obama souhaite se gagner l'approbation du Congrès américain ce mois-ci pour un accord de libre-échange avec la Colombie similaire à celui du Canada. Les syndicats de travailleurs américains insistent: "La Colombie est l'un des plus dangereux pays au monde pour les dirigeants syndicaux". Il se seraient produit quantité de meurtres et d'enlèvements de syndicalistes et de journalistes, au cours des ans en Colombie. Il est allégué que le gouvernement colombien est relié à de violents commandos paramilitaires.

Pour entendre ce que des Colombiens pensent du projet de libre-échange entre les États-Unis et la Colombie visionner ces trois vidéos sur U-Tube:
Travailleurs à petite échelle - http://bit.ly/pDHs0N
Afro-Colombiens et Indigènes - http://bit.ly/q5BYPH
Société civile de Colombie - http://bit.ly/oWvv8o

John Baglow, dans un récent article publié dans The Mark intitulé The price of business as usual rapporte que la Colombie grouille de milices paramilitaires à la solde des grandes corporations et qui travaillent souvent de concert avec les forces gouvernementales pour supprimer les populations locales de territoires convoités, éliminer les défenseurs des droits humains et assassiner des leaders syndicaux.

De 1987 à 2008, plus de 2,500 syndicalistes ont été assassinés en Colombie. En fait, plus d'activistes syndicaux ont été tués chaque année en Colombie que dans tous les autres pays réunis. Ces meurtres restent pour la lupart impunis et ils se poursuivent aujourd'hui. Durant la même période, entre 3 et 5 millions de personnes dans les communautés autochtones et afro-colombiennes auraient été évincées de force de leurs foyers.

Mais le premier ministre Harper a dit " la Colombie revient de loin et le passé de ce pays ne devrait pas se dresser sur le passage d'échanges commerciaux futurs".

Les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), le plus grand groupe d'allégeance marxiste de guérilla de Colombie a repris ses attaques contre le secteur pétrolier au cours des récents mois. Ces attaques ont allumé un débat en Colombie à savoir qui devrait assurer la sécurité des populations: le Gouvernement ou les compagnies?

le 7 août 2011, les FARC furent blâmées pour avoir fait exploser de l'équipement de forage et avoir brûlé 1,000 bails de pétrole brut dans un champ pétrolifère près; de la frontière vénézuélienne, exploité par la compagnie canadienne Alange-Energy (TSX-V: ALE).

Le directeur d'une association de multinationales pétrolières qui opèrent en Colombie a déclaré le 10 août dernier qu'il revient au gouvernement de protéger les travailleurs et les infrastructures des attaques de rebelles. Mais le ministre de la défense de la Colombie a dit qu'il est impossible pour les militaires de défendre chacune des installations et qu'il revient aux compagnies d'engager des forces de sécurité.

En juin 2011, le Congrès de Colombie a adopté une Loi sur les victimes et la restitution des terres . Cette loi à laquelle il restait pour son entrée en vigueur la sanction du président Juan Manuel Santos, ne couvre pas les terres spoliées aux afro-colombiens et aux indigènes. Il est évident, selon Marcelo Pollack, analyste pour la Colombie d'Amnesty International, que ces deux communautés doivent être consultées et associées à l'Élaboration de toute législation future.

Cette première pièce législative était adoptée par le Congrès colombien au moment même où on rapportait une recrudescence d'exactions et d'asssasinats de leaders des communautés déplacées et de celles qui réclament la restitution de leurs terres volées. Quelques personnes impliquées dans des enquêtes criminelles telles que des victimes, des témoins, des avocats, des procureurs et des juges continuent d'essuyer des menaces et d'être victimes d'attentats.

“Tout effort pour défaire des fautes du passé et du présent, doivent par conséquent inclure des mesures efficaces pour que cessent des abus aux droits humains qui ont marqué l'histoire des conflits depuis 45 ans et que cesse l'impunité qui a protégé jusqu'à maintenant les responsables de ces actes" concluait Marcelo Pollack.Lire plus (en anglais) dans un articles d'Amnesty International du 3 juin 2011.

Plusieurs compagnies s'aventurent dans des régions contrôlées par les FARC. L'une d'elle, la canadienne Talisman Energy (TSX:TLM) devait en mars 2011 déplorer l'enlèvement de 23 contractuels qui étaient à sa solde. Selon un article de DAN MOLINSKI paru dans THE WALL STREE JOURNAL DU 8 MARS 2011, tous sauf un auraient été relâchés, suite à d'intenses attaques aériennes et terrestres de l'armé colombienne, dans l'est de la jungle de Vichada, près de la frontière vénézuélienne.

Talisman Energy (TSX-TLM)annonçait le 20 mai 2011 une importante découverte ailleurs en Colombie de condensat de gaz naturel, par voie de Communiqué de presse, paru dans Market News. La compagnie faisait état de différents risques associés à l'exploitation future de ce gisement dans les contreforts des Andes de la région de Niscota à 300 km au nord-est de Bogota, la capitale colombienne, et ce, sans aucune mention des risques éco-sociaux. Ces derniers seraient-ils désormais externalisés aux frais du gouvernement colombien en vertu du nouvel Accord de libre-échange avec le Canada?

Dès août 2011 Chris Spaulding, le directeur de Talisman en Colombie, pouvait déclarer: " Malgré les risques, la situation générale est que la sécurité s'améliore significativement ici". Spaulding poursuit: " Depuis des années et des années, l'industrie savait qu'il y avait beaucoup de ressources en Colombie, mais ne pouvait se mettre à les explorer et les exploiter, à cause des problèmes de sécurité. Les enjeux de sécurité sont actuellement significativement meilleurs. Maintenant, l'industrie peut entrer et commencer à progresser dans ses projets".

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire