vendredi 8 juillet 2011

Contamination au TCE à Shannon... Où sont les politiciens? Où en est est le procès?

La contamination de la nappe phréatique à Valcartier et à Shannon aurait pu être évitée si les responsables avaient tenu compte des nombreux avertissements qui leur ont été faits dès le début des années 50, a témoigné un expert, dans le cadre du recours collectif contre le Procureur Général du Canada, La Société Immobilière Valcartier--SNC-Lavalin ( qui vient d'avaler pour une bouchée de pain Énergie Atomique du Canada) et General Dynamics (le plus gros fabricant d'armement au monde).

Dr Anthony Travis: «On n'a jamais pris les moyens adéquats pour éliminer les produits toxiques avant le rejet dans l'environnement», estimait comme témoin cité au procès en avril dernier l'historien des sciences, qui enseigne à deux universités israéliennes.

Une longue histoire d'incurie environnementale et sanitaire
Tous les responsables qui se sont succédés au laboratoire du CARDE, puis du DRE et à L'usine d'armement de la base de Valcartier savaient et n'ont rien fait durant 30 ans. Les 25 ans suivants, on a tout fait pour cacher, nier, garder le secret du "Blue Lagoon", la vidange des solvants organiques riches en trichloroéthylène(TCE) indispensables pour la fabrication des carburants solides fissibles haute performance pour les missiles. En audience au procès le DocteurTravis a cité plusieurs documents, obtenus par les avocats des citoyens de Shannon, où on fait état des dangers qu'entraînent les rejets de produits toxiques dans l'environnement. Par exemple, en 1953, le ministère de la Santé du Canada se dit «dans l'obligation de vous demander d'éliminer les dangers de contamination chimique qui pourraient altérer l'eau et même la rendre impropre à la consommation».

Tandis que au CARDE (Canadian Armament Research and Development Establishment) on mettait au point à Valcartier des missiles anti-tank tel que le Heller et plus tard on développait des missiles air-air tel que le Velvet Glove et que s'intensifiaient les essais de propulseurs de missiles...

En 1957, des consultants engagés par les Arsenaux canadiens observent : «On ne peut qu'être troublés par les méthodes utilisées par CARDE pour disposer des rejets de ses laboratoires. En raison de la nature du sol et des niveaux d'eau et du fait que les puits sont la seule source d'approvisionnement en eau dans la région, toute action qui présente le moindre risque de contamination de cette ressource pourrait entraîner les plus graves conséquences...»

Malgré plusieurs avertissements du genre, les méthodes utilisées à Valcartier n'ont guère changé avant les années 80. En fait, a expliqué M. Travis au juge Bernard Godbout, la méthode recommandée pour disposer d'un solvant comme le trichloréthylène (TCE) était de l'épandre sur un terrain sec pour qu'il s'évapore. Mais à Shannon, on creusait des lagons dans un terrain humide et sablonneux. Les contaminants, plus denses que l'eau, étaient vite lixiviés, disparaissant dans les porosités du gravier sous-jacent, d'autant plus que la nappe souterraine se trouvait à un mètre à peine du fond de ces lagons. "Une telle situation, où on a ignoré les avertissements répétés et les consignes de sécurité, ne pouvait que déboucher sur la contamination à long terme de l'aquifère", conclut-il.


Au procès, ce fut la guerre froide entre les experts
Robert P. Chapuis, professeur d'hydrogéologie à l'École Polytechnique de Montréal et ex-directeur du Département de génie minéral, a examiné plusieurs études réalisées sur le cas de Shannon, dont celle importante de l'INRS en 2003. «Les puits de Shannon ont été atteints par les contaminants dissous à partir de 1956, mais ils auraient même pu l'être dès 1951, pour une exposition de 45 à 50 ans.», estime le scientifique. l'expert aborde aussi un sujet qui est, jusqu'ici, ignoré des procédures : à quoi ont été exposés les milliers de militaires qui utilisaient le réseau d'aqueduc de Valcartier, ainsi que les milliers de gens qui ont travaillé aux usines d'Industries Valcartier? Ces deux groupes ne font pas partie du recours collectif mais ils n'en ont pas moins été exposés aux mêmes contaminants, selon l'hydrogéologue..

Toujours selon M. Chapuis, «Le réseau d'aqueduc des Industries Valcartier (IVI) a été atteint depuis le milieu des années 40 et le réseau de la base depuis 1963 ou avant...» Cela signifierait que les militaires et les employés d'IVI ont eux aussi été exposés au produit toxique sur une longue période de temps. L'expert cité à témoin lors du procès a déposé plusieurs données à l'appui de sa thèse. Notamment, il croit qu'on sous-estime la quantité de polluants qui aurait été déversée dans le sol avant de migrer jusqu'à la nappe phréatique.

D'après une estimation faite en 2003 par l'INRS, la masse totale de TCE dans le panache représente un peu plus d'une tonne (1200 kg). M. Chapuis remet ce calcul en doute à partir des volumes pompés d'une seule source de contamination. En sept ans, souligne-t-il, on a retiré près de 500 kg du seul secteur 214, «qui ne représente pourtant qu'une petite partie du panache».

En se basant sur les divers témoignages recueillis jusqu'ici, écrit-il, «on peut estimer que les quantités de TCE livrées, utilisées puis rejetées à divers sites depuis 1940 dépasseraient 1700 tonnes... Des concentrations élevées de TCE auraient donc existé dans l'eau souterraine depuis 1940 même si aucune analyse chimique n'a été faite avant 1990».

De plus, le rapport-synthèse de l'INRS identifie quatre principales sources de contamination, mais selon M. Chapuis, la réalité serait beaucoup plus importante. À partir de photos aériennes de la base prises depuis 1928, note-t-il, «il y aurait probablement des douzaines de zones-sources à considérer, compte tenu du nombre de chemins sans issue, débouchant sur une tranchée ou un bassin ou une zone de remblais».


Des candidats de tous les partis (sauf les conservateurs!)
font dans la circonscription des promesses... sans lendemain?


En vue des élections fédérales du 2 mai 2011, les candidats de la région s'arrachaient le juteux dossier des TCE à Shannon. Que peut bien faire maintenant la "Vague Orange" avec les conséquences du " Blue Lagoon" comme le surnommaient les employés de la base miltaire de Valcartier?

Le Bloc québécois demandait au gouvernement conservateur de négocier une entente à l'amiable avec les citoyens de Shannon, dans le recours collectif portant sur la contamination de l'eau, et il accusait le député indépendant de Portneuf-Jacques-Cartier, André Arthur, d'inaction dans ce dossier.Tout le monde (sauf les Conservateur!!!) s'est plaint de l'absence du député André Arthur dans ce dossier durant les deux terme qu'il a fait comme député indépendant dans la circonscription de Portneuf--Jacques-Cartier. Ce qu'on a entendu de la part de ce dernier au sujet du TCE à Shannon, se résume à ceci: "Ce sont les militaires qui sont les premiers à blâmer".
Monsieur Arthur est tout de même intervenu auprès de l'ex-ministre et maintenant sénatrice Josée Verner, et auprès de Clive Kiley, le maire de Shannon, pour faire débloquer, au début de 2009, l'aide supplémentaire de 13 millions $ qui a permis à la municipalité de creuser les puits qui approvisionnent son réseau d'aqueduc. Quant à prendre la parole au parlement à ce sujet, la député Arthur craignait de commettre un infraction car l'affaire est toujours SUB JUDICE.

La bloquiste députée de Québec Christiane Gagnon avait alors "par défaut au plan politique" pris la cause du Regroupement des Citoyens de Shannon sous son aile à Ottawa et se faisait constamment clouer le bec par les conservateurs en Chambre qui répondaient invariablement à ses questions que "le cas de Shannon est devant les tribunaux..." Durant la campagne Mme Gagnon a déclaré, raillant le thème de la campagne conservatrice : «Si la région était au pouvoir comme les conservateurs le prétendent, ça fait longtemps que le premier ministre aurait décidé de négocier un règlement hors cour. S'il y avait une volonté politique, on n'en serait pas là aujourd'hui.» NDLR: Maintenant c'est encore Stephen Harper qui est au pouvoir, et majoritaire pour les quatre années qui viennent. Les probabilités sont fortes que le procès se rende en Cour Suprême et que les procédures s'étirent au-delà des quatre années prévue de la 40e législature.

Des élus de tous les paliers de gouvernement se lancent la balle
... encore pour longtemps?
S'il n'en tenait qu'à Thomas Mulcair, à présent l'adjoint du Chef de l'Opposition Jack Layton du Nouveau Parti démocratique (NPD), c'est par la négociation que se réglerait le recours collectif des citoyens de Shannon, et non pas devant les tribunaux. Le Député d'Outremont, M. Mulcair indiquait au Soleil durant la campagne électorale son désaccord sur la façon dont le dossier des réclamations venant des citoyens de Shannon a été traité jusqu'ici.

Selon Mulcair, ex-ministre québécois de l'environnement sous Jean Charest et ex-enseignant au St-Lawrence College à Québec, où il avait comme élèves plusieurs jeunes gens de Shannon, s'est dit très au fait du dossier des TCE:"Le cas de Shannon constitue une défaillance monumentale dans la protection du public. On fait traîner ça en long et en large, alors qu'à mon avis, pour ce que je sais de la responsabilité et de la faute, ça devrait se régler rapidement et non pas laisser ça s'éterniser devant les tribunaux. (...)C'est un des pires cas de manquement à la protection du public que j'ai vu dans ma carrière, qui couvre plus de 30 ans, et vous pouvez être sûr que je mettrai toute mon expérience et mon énergie à le régler rapidement», a-t-il déclaré à un journaliste du Soleil, quelques jours avant l'élection qui fit du NPD, le 2 mai dernier, le parti de l'Opposition officielle à Ottawa.
En campagne électorale, le candidat bloquiste dans Portneuf--Jacques-Cartier, Richard Côté avait qualifié de «plus grande lutte citoyenne au Canada» le recours collectif qu’ont intenté les citoyens de cette municipalité. «En cela, ces gens méritent notre admiration» clàmait-il.Le Bloc Québécois tout comme le NPD a sommé le premier ministre minoritaire sortant de mettre fin immédiatement au procès et d’indemniser les gens de Shannon. Et Voilà! le gouvernement Harper est revenu majoritaire désormais...

Un procès qui semble nuire au développement économique à Valcartier
Le dossier du TCE à Shannon s'avère majeur: Les 4000 membres du recours collectif du Regroupement des citoyens de Shannon se battent depuis bientôt 11 ans pour obtenir justice. Rien ne remplacera les êtres chers victimes de cancers qui s'avèrent causés par le TCE, de l'aveu à peine voilé la Direction régionale de la Santé publique qui résista longtemps à se prononcer; pas même d'éventuelles compensations financières aux victimes, si un jour le Gouvernement fédéral parvient de gré ou de force à se responsabiliser. Les Shannonnites se battent pour leur dignité humaine. DErant des décennies, on les a abusé en ignorant leurs souffrances, leurs maladies, leurs droits à la santé, à L'information, à une eau potable accessible et abordable et à l'assainissement de leur milieu de vie.

Cette bataille légale limiterait selon certains observateurs l’essor du Technopôle Défense et sécurité(TDS) de Valcartier-Shannon. Selon Richard Côté, le candidat défait du BLoc Québécois, «tant que le recours collectif ne sera pas réglé et que personne ne prendra en charge la décontamination des sols, les entreprises concernées demeureront réticentes à s’installer ici». NLDR: Le problème est que le panache de contamination a pris un telle amplitude qu'il est techniquement impossible de décontaminer les sols de la base militaire et de l'agglomération tout autour. Seule la nature , au rythme qui est le sien y parviendra dans quelques centaines, voire milliers d'années, en diluant le plus gros des TCE dans la rivière Jacqus Cartier, puis le Saint-Laurent.

Photo: Laetitia DeKoninck - Le Soleil

Elaine Michaud est à 25 ans la nouvelle élue du NPD qui représente les Shannonnites à Ottawa.
La jeune politicienne (dont le père fut militaire de carrière), est détentrice d'un baccalauréat en psychologie et d'un baccalauréat en science politique de l'Université Laval. Suite à une session à l'Institut d'études politiques de Bordeaux au cours de l'automne 2008 elle poursuivait une maîtrise à l'École nationale d'administration publique,lors de son élection, le 2 mai dernier..Elle a du laisser son poste de préposée à l'information à la Régie de l'assurance maladie du Québec. En ce moment, Élaine Michaud apprend à la hâte son nouveau métier de politicienne. "Les gens voulaient du changement dans la manière de fonctionner à la Chambre des communes".

Lors d'une interview avec Baptiste Ricard-Châtelain du Journal le Soleil, le 21 mai dernier, Élaine Michaud a dit " je souhaite que la partisanerie à tous crins, les chicanes cessent". Parviendrait-t-elle avec ses collègues du NPD et un fort appui populaire à forcer la main de Steven Harper pour régler un problème dans un château-fort électoral qui s'est écroulé pour lui? Un réglement hors cour, avant que la cause ne transite en Cour d'Appel puis ne pourrisse devant la plus haute instance juridique canadienne, semble loin d'être acquis.

Selon Le Soleil le 21 mai,devant ce défi de taille et ses nouvelles fonctions en général, la nouvelle élue dans Portneuf--Jacques-Cartier vit d'espoir: "...d'être en mesure de faire souffler un vent de positivisme sur les débats". La jeune parlementaire évalue qu'elle sera ainsi en mesure de défendre adéquatement les dossiers de sa circonscription. Celui du Regroupement des citoyens de Shannon est non le moindre.

Quant au déroulement du procès, il accuserait 100 jours de retard au moins. Aux dernières nouvelles, le 6 juillet, le juge Bernard Godbout de la Cour Supérieure du Québec a ajourné pour une période de six semaines les séances qui devraient reprendre le 22 août 2011... Et ce n'est pas fini! Le recours collectif des citoyens de Shannon sur la contamination de l'eau à Valcartier va s'étirer bien au-delà de l'échéance d'abord prévue du mois de juin. Les avocats des deux parties s'attendent maintenant à conclure leurs plaidoiries vers la fin octobre, soit quatre mois plus tard.

Souhaitons aux trois vaillants Shannonites qui représentent 4000 concitoyens: Marie-Paule Spieser, Dr Claude Juneau et P. Jean Bernier, un répit ressourçant en famille, une bonne santé... et qui sait, quelques encouragements!

Sources journalistiques: Pierre Asselin, Charles Laviolette, Alain Turgeon, Isabelle Chabot, Baptiste Ricard-Châtelain
Médias: Le Soleil, info-Portneuf, Courrier de Portneuf, Québec Hebdo, Le Jacques-Cartier
Publications originales : les 13, 15, 21, 29 avril 21 mai et 15 juin 2011
Source autres ( textes et photos): blogue Jos Public; Sites web des Forces armées canadiennes, du Regroupement des Citoyens de Shanon et du NPD; meteopolitique.com; harper-watch.ca

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