Une caricature insultante pour les Algonquins
Conseil tribal de la nation Anishinabeg
L'Écho Abitibien: Echos des lecteurs - Publié le 30 juin 2011 à 09:47
Réagissant à la récente publicité utilisée par la compagnie Eaux vives water destinée à faire la promotion de l’eau embouteillée Eska , les chefs membres du Conseil tribal de la nation algonquine Anishinabeg ont qualifié ce type de promotion de raciste et profondément offensante pour la peuple algonquin et demandent son retrait immédiat.
La publicité en question met en scène trois personnages déguisés en guerriers autochtones et désigné comme les « guerriers Eskans » et chargés de protéger la pureté de l’eau depuis 8000 ans, selon une légende inventée par Eska pour les besoins de la promotion de son produit.
« C’est une caricature raciste et dégradante des peuples autochtones et plus particulièrement des Algonquins dont c’est le territoire ancestral », a déclaré la vice grand chef, Mme Marlène Jérôme, au nom des communautés membres du Conseil tribal. « Les autochtones sont présentés dans cette publicité comme des êtres primitifs et ridicules, véhiculant encore une fois de vieux préjugés. »
Cela est d’autant plus frustrant, selon la vice grand chef, que dans la culture algonquine, ce sont les femmes qui sont les protectrices de l’eau jugée comme la source même de toute vie, ce qu’une compagnie implantée au cœur du territoire algonquin aurait dû savoir. « Il est bien évident que cette compagnie et la firme de publicité qu’elle a embauchée n’ont pas vérifié le contenu auprès de groupes autochtones et nous exigeons le retrait immédiat de ces messages dégradants » a ajouté Mme Jérôme.
Mme Jérôme a aussi rappelé que cette source fait partie de Nitakinan, le territoire ancestral algonquin, et que ce territoire n’a jamais été cédé ou abandonné. La compagnie Eaux vives water de Toronto qui exploite cette source depuis 2001 n’a jamais cru bon de négocier avec les Algonquins pour s’implanter et utiliser cette ressource si précieuse. « Nous ne recevons aucune redevance pour l’exploitation de notre eau à des fins commerciales et aujourd’hui la compagnie utilise une image des autochtones tirée d’une bande dessinée de mauvaise qualité pour en faire la promotion. Comme le dit le dicton, c’est la goutte qui fait déborder le vase ».
Mme Jérôme et les chefs du Conseil tribal demandent à tous les consommateurs et à tous ceux qui luttent contre les préjugés racistes de boycotter l’eau Eska tant que ces publicités n’auront pas été retirées des ondes et que la compagnie Eaux vives water et son président Jim Delsnyder n’auront pas présenté des excuses aux autochtones et plus particulièrement au peuple Algonquin.
Dans une première lettre ouverte, mardi, le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or, sous la plume d’Édith Cloutier, dénonçait les publicités jugées offensantes. « Ce qui dérange dans votre message, c’est le renforcement des préjugés à l’égard des Premiers Peuples: des indigènes primitifs incarnés en guerriers Eska, à l’allure de nonos, prêts à tuer pour protéger la pureté de l’eau depuis 8000 ans. »
Affirmant que l’autodérision ne leur fait pas peur, Mme Cloutier ajoutait : « Autant l’humour est un outil exceptionnel pour passer des messages, autant peut-il créer l’effet inverse. Malheureusement, plutôt que d’être sympathique, votre publicité crée un malaise et est blessante pour plusieurs. »
Eaux Vives a répondu
Dans un premier communiqué laconique diffusé mardi, le président d’Eaux Vives water se disait désolé d’apprendre que la publicité avait offensé des gens. Il assurait même qu’une attention toute particulière avait été portée afin qu’il n’y ait pas de référence culturelle spécifique à quelque nation que ce soit dans l’habillement et le style des personnages présentés.
Le lendemain, M. Delsnyder insistait sur la fierté d’Eska d’avoir noué et entretenu de bonnes relations avec la communauté. « C’est là où nos employés vivent, travaillent et élèvent leur famille, a-t-il fait valoir. Leurs préoccupations sont aussi les nôtres. Bien que notre nouvelle campagne publicitaire ait soulevé peu de critiques, nous prenons ce genre de commentaire très au sérieux. »
« À cet égard, nous tendons la main aux dirigeants locaux qui ont émis publiquement leurs opinions afin d’ouvrir le dialogue et d’étudier les prochaines étapes. »
Le Conseil tribal de la nation algonquine Anishinabeg est composé de sept communautés algonquines dirigées par un conseil de bande et des chefs élus par leurs membres. Ce sont les communautés d’Abitibiwinni (chef Jean-Paul Rankin), d’Eagle Village (chef Madeleine Paul), de Kitcisakik (chef Adrienne Anichinapéo), de Kitigan Zibi (chef Gilbert Whiteduck), de Lac Simon (chef Salomée McKenzie), de Long Point (chef Leonard Polson) et Wahgoshig (chef Dave Babin).
Développement et Paix est l’organisme officiel de solidarité internationale de l’Église catholique au Canada et le membre canadien de Caritas Internationalis. Développement et Paix est financé par les collectes de fonds dans les paroisses, les dons individuels et des subventions gouvernementales, provenant surtout de l’Agence canadienne de développement international.
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